Mort dans la rue
Comme d’habitude, il allait dormir dans la rue…
Son chien tapi auprès de lui.
Comme d’habitude le froid sera vite accru,
A moins que tombe la pluie.
Soir de novembre sans pitié pour les exclus !
Que montre ta lumière pâle ?
Un visage rougeaud sous des pattes velues,
Un corps recouvert d’habits sales.
Il est étalé sur le trottoir, sans pudeur,
Dans son manteau pour couverture.
Il est sans illusion, il n’est plus quémandeur,
Ce soir, c’est fini l’aventure…
Las d’implorer il a cessé de regarder…
…n’entend plus les bruits de la ville.
Il méprise la faim qu’il ne peut amender.
Qu’importe son air incivil.
Les gens passent pressés détournant le regard,
Feignant d’ignorer l’infortune,
Craignant l’apitoiement sous les yeux hagards.
Oh ! que nul regret n’importune !
Puis le froid saisit d’un lâche engourdissement .
Le vagabond va s’endormir…
S’abandonner et dormir… glisser, sans tourment.
Ainsi passa-t-il sans gémir.
Par plainte le chien fit office des morts .
Ce fut toute la différence .
Montrant des sentiments, on eut quelques remords,
Vite effacés d’indifférence…
On parle souvent des morts dans la rue quand il fait froid,
mais en réalité on meurt toute l’année…
On meurt d’affaiblissement,
De manque de sommeil,
D’être inutile,
..que personne n’attend rien de nous .
Ce poème est écrit par mon ami Albert Blanchard, auteur de Nantes..
"On meurt, devant les regards qui se détournent.
En fait, la mort vient profondément du manque de lien social,
Et là-dessus on est tous concernés.,
Cécile Roca
sur France-Inter"